« Avant, le liège était au cœur de nos campagnes, maintenant il n’y a plus rien », Maurice Junqué, du haut de ses 86 ans, a tout connu.
Visiter une des dernières entreprises varoises de liège, en l’occurrence les établissements Junqué, est un voyage dans le temps… ça et là, les anciennes machines pour les bouchons prennent la poussière, certains la rouille, « jusqu’à 60 000 bouchons par jour, par machine », des souvenirs éclairent le visage de Maurice, au temps où il avait encore son entreprise de bouchons à Gonfaron « une affaire familiale, une trentaine de salariés ». Toute une vie.
« Dans le Var, on avait la meilleure qualité de liège, tout le monde nous l’enviait. »
Effectivement, le liège connut un riche passé varois, dont l’histoire a commencée dans les années 1820 avec des bouchonneries sur Collobrières et la Garde-Freinet, qui seront les deux capitales de cette filière. S’en suivra, des hauts, des bas, puis une quasi disparition de la filière (voir le graphique ci-dessous).
Malgré la grave déprise, Maurice, fils et petit fils de bouchonnier, contre vents et marées, va résister, et continuer, encore aujourd’hui, à travailler tous les jours le liège de ces aïeux.
« C’est une histoire familiale, mon arrière grand père était déjà dans la filière, notre cœur a toujours battu pour le liège. »
L’entreprise pratique encore le levage du liège, en partenariat notamment avec Gavino Palitta, un bouchonnier sarde, à eux deux, ils lèvent en moyenne 200 à 300 tonnes de liège par an. Cependant, rien n’est facile.
« On ne trouve plus d’ouvriers, le savoir-faire s’est perdu, plus personne ne sait lever le liège », regrette Maurice, s’appuyant encore sur d’ultimes irréductibles, une poignée.
Les lièges levés sont ensuite séchés, bouillis, traités et triés.
Une partie de la récolte est mise à la vente directement auprès de spécialistes fabricants de bouchons pour vins de garde. L’autre partie est travaillée sur l’exploitation pour la fabrication de bouchons spéciaux (bouchons croûtes, ventres, etc), palangrottes destinés à la pêche à la ligne, de couasses ou encore de pots en liège pour les plantes.
Enfin, rien ne se gaspille, les chutes de liège (sur la gauche de la photo), et le liège mâle ou femelle de moindre qualité, sont transformés en granulés de différentes dimensions, ils seront utilisés pour l’isolation (en vrac ou en panneau).
« L’avenir de la filière se trouve dans l’isolant, c’est le meilleur, imputrescible, résistant aux insectes, aux rongeurs et au temps, sans perdre de sa qualité. Il est éternel, tout en étant un excellent isolant phonique, thermique. C’est un matériau d’avenir. Je ne comprends pas comment on peut continuer à utiliser la laine de verre ou de roche. »
Le prix n’est pas le même, mais ses qualités non plus.
Désormais installé au Château Payan, route de Gonfaron à Flassans sur Issole, l’entreprise va continuer !
« Je veux rester dans l’optique actuelle, à échelle humaine. Pour l’avenir, développer la levée de liège permettant d’entretenir les forêts à l’abandon, mais le problème reste le manque de main d’oeuvre. En terme de produits, les bouchons ne représentant plus l’avenir pour nous, mais l’isolation oui, et je compte développer la communication là-dessus. »
A croire, que les établissements Junqué soient vraiment éternels, et leur histoire définitivement indissociable avec celle de la filière.
Pour aller plus loin, le lien vers leur site internet => https://www.liege-junque.com/
Bravo pour votre opiniâtreté et votre attachement à cette matière unique: le liège !
Les chênes liège font partie de notre patrimoine provençale et votre action contribue à sa préservation.L’avenir est prometteur, tout dépend de la diffusion locale, nationale voire internationale de ce « produit » à fort potentiel. Bon courage. Cordialement. Mme Boulou.B
Merci beaucoup pour votre commentaire qui fait chaud au cœur et à votre soutien. A bientôt 🙂